Manuel Valls est-il contre l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de lesbiennes ?
Dimanche 20 janvier, il a déclaré à l’émission Dimanche+ : « Je ne voterais pas la PMA dans le texte de loi sur le mariage pour tous et l’adoption », après avoir dit un NON ferme à la question : « Si vous étiez député socialiste, voteriez vous en faveur de la PMA, à la fin du mois voire en mars ? » Il a justifié sa position en disant que « La PMA, c’est un sujet extrêmement compliqué » et que cela « mérite un débat approfondi (…) long et fourni. Ce sont des questions très lourdes ».
Intéressantes déclarations, mais font-elles de Manuel Valls un opposant à la PMA ? Non, car son opposition ne porte pas sur la PMA, mais sur l’opportunité d’un vote au Parlement à la fin du mois ou même en mars. Manuel Valls ne se prononce pas sur le fond du sujet mais sur la forme : il réclame un « débat approfondi (…), long et fourni ». Fait-il allusion par là à des Etats-généraux comme ceux mentionnés dans la loi de 2011 sur la bioéthique ? C’est possible et ce serait un changement car nous savons que le gouvernement socialiste en a cure de cette disposition légale…
Mais une autre interprétation de cette « Valls hésitation » est possible : le gouvernement n’est pas à son aise sur ce sujet. Le mariage pour tous, et à plus forte raison la PMA, sont contestés par un mouvement populaire qui a réussi à lever plus d’un million de personnes le 13 janvier. Le gouvernement n’a donc pas le choix, pour faire passer le mariage pour tous et l’adoption, il est obligé de repousser la PMA et de taire, pour l’instant, la gestation pour autrui (GPA). Cela a pour conséquence l’abandon du vote de la PMA dans le même texte que le mariage, et son ajournement à une prochaine loi sur la famille. Avec un débat public et la liberté de vote des députés socialistes ? C’est possible, ce serait alors une forme de compromis visant à prioriser le passage (en force bien-sûr) du mariage pour tous.
Mais ne nous leurrons pas, l’ajournement de la PMA, et le passage sous silence de la GPA, appartiennent à la logique de la grenouille ébouillantée. Comme un pauvre batracien dans une casserole d’eau froide dont la température monte lentement jusqu’à ébullition, l’opinion publique n’est pas brusquée par des mesures sociétales fondamentales survenant d’un seul coup. On procède par étape. Le mariage pour tous et l’adoption d’abord, avec un semi-débat, puis la PMA avec un débat et enfin la GPA remise à plus tard.
Les propos de Valls obéissent très certainement à cette logique. Exactement comme Elisabeth Guigou en 1999 qui voulait faire passer le PaCS en le séparant de la filiation. Son discours vibrant sur la différence des sexes était une manipulation, bien assumée depuis. C’est aussi le cas de Najat Vallaud-Belkacem qui se prononce actuellement contre la GPA, alors qu’elle y était favorable il y a un an… Tout est stratégie, il ne faudrait surtout pas que la grenouille prenne conscience trop vite que l’eau est en train de bouillir.
Le discours anesthésiant de Manuel Valls ne doit pas nous faire oublier une chose essentielle : le mariage, dans le droit civil, est intimement lié à la filiation. Ainsi, le projet de mariage pour tous le lie clairement à l’adoption et à la filiation. Si le mariage est ouvert aux homosexuels, il ouvrira les portes à la PMA. Il serait en effet discriminant que les couples mariés hétérosexuels y aient accès et non les couples mariés homosexuels. Si la PMA est ouverte pour les couples mariés lesbiens, pourquoi n’en serait-il pas de même pour les couples d’hommes ? Ainsi, la GPA serait automatiquement justifiée pour les couples d’hommes…et finalement pourquoi pas pour tous afin de ne faire aucune discrimination ?
La logique est imparable et la Valls hésitation de Manuel et des socialistes ne fait que retarder les nouvelles lois qu’ils veulent mettre en place. Nouvelles lois qui sont revendiquées clairement par le lobby LGBT, hormis la GPA qui est moins ouvertement dans les tuyaux. Celle-ci est tout de même demandée, il suffit de se référer au document du Monde de 2011, et aux propos de Pierre Bergé, mais l’inter-LGBT et le gouvernement ne la mettent pas en avant : ce sera une étape suivante.
Ainsi, il est logique que, quand on est contre l’adoption, la PMA et la GPA, nous soyons aussi contre le mariage pour tous… Ce qui ne nous empêche pas de proposer à la place une alliance civile qui ne touche pas le régime de la filiation.