Le Gouvernement serait-il mal-à-l’aise avec l’écologie ?

Delphine Batho et son successeur, Philippe MartinIl semble que François Hollande ait du mal avec l’écologie… beaucoup de mal même. Le limogeage de Delphine Batho semble confirmer ce malaise. En effet, celle-ci a eu le malheur de critiquer un projet de budget contenant de très grosses coupes au détriment du ministère de l’écologie. Ministère qui se trouve dans la situation peu enviable de plus gros perdant du nouveau budget ! 

Tout un symbole ! Ce qui peut nous laisser penser que le gouvernement Ayrault considère l’écologie comme la cinquième roue du carrosse républicain… et nous le pensons sérieusement, tant cet évènement n’est pas le seul symptôme : avant madame Batho, c’est Nicole Bricq qui a fait les frais d’une éviction pour cause de désaccord avec le gouvernement socialiste sur les forages au large de la Guyane. 

Pour le binôme Hollande-Ayrault un bon ministre de l’écologie serait-il un ministre muet ? Lire la suite

Découpage régional et décentralisation

Les régions françaises et leurs blasonsLa décentralisation est une question politique essentielle. Elle s’intéresse au plus près de la vie démocratique car elle tente de réduire la distance entre les citoyens et leurs représentants. Elle est liée à des principes politiques fondamentaux : le principe de subsidiarité et la participation des citoyens.

Malheureusement cette question est peu médiatisée. Elle est pourtant au cœur du débat politique actuel avec le projet de réforme des collectivités territoriales initié par le gouvernement. Surnommé acte III de la décentralisation, il vise à rendre plus simple et plus efficace l’actuelle organisation territoriale.

Sur le site du Courant pour l’Ecologie humaine, j’ai abordé cette question en cherchant quelques points de repères pour une réflexion sur ce sujet. Je vous renvoie à ce texte.

J’aimerais ici parler d’un aspect particulier de la décentralisation : le découpage des régions françaises et le choix des critères définissant les périmètres régionaux.  Lire la suite

PMA : Valls hésitation

manu vallsManuel Valls est-il contre l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de lesbiennes ?

Dimanche 20 janvier, il a déclaré à l’émission Dimanche+ : « Je ne voterais pas la PMA dans le texte de loi sur le mariage pour tous et l’adoption », après avoir dit un NON ferme à la question : « Si vous étiez député socialiste, voteriez vous en faveur de la PMA, à la fin du mois voire en mars ? » Il a justifié sa position en disant que « La PMA, c’est un sujet extrêmement compliqué » et que cela « mérite un débat approfondi (…) long et fourni. Ce sont des questions très lourdes ».

Intéressantes déclarations, mais font-elles de Manuel Valls un opposant à la PMA ? Non, car son opposition ne porte pas sur la PMA, mais sur l’opportunité d’un vote au Parlement à la fin du mois ou même en mars. Manuel Valls ne se prononce pas sur le fond du sujet mais sur la forme : il réclame un « débat approfondi (…), long et fourni ». Fait-il allusion par là à des Etats-généraux comme ceux mentionnés dans la loi de 2011 sur la bioéthique ? C’est possible et ce serait un changement car nous savons que le gouvernement socialiste en a cure de cette disposition légale…

Mais une autre interprétation de cette « Valls hésitation » est possible : le gouvernement n’est pas à son aise sur ce sujet. Le mariage pour tous, et à plus forte raison la PMA, sont contestés par un mouvement populaire qui a réussi à lever plus d’un million de personnes le 13 janvier. Le gouvernement n’a donc pas le choix, pour faire passer le mariage pour tous et l’adoption, il est obligé de repousser la PMA et de taire, pour l’instant, la gestation pour autrui (GPA). Cela a pour conséquence l’abandon du vote de la PMA dans le même texte que le mariage, et son ajournement à une prochaine loi sur la famille. Avec un débat public et la liberté de vote des députés socialistes ? C’est possible, ce serait alors une forme de compromis visant à prioriser le passage (en force bien-sûr) du mariage pour tous.

Mais ne nous leurrons pas, l’ajournement de la PMA, et le passage sous silence de la GPA, appartiennent à la logique de la grenouille ébouillantée. Comme un pauvre batracien dans une casserole d’eau froide dont la température monte lentement jusqu’à ébullition, l’opinion publique n’est pas brusquée par des mesures sociétales fondamentales survenant d’un seul coup. On procède par étape. Le mariage pour tous et l’adoption d’abord, avec un semi-débat, puis la PMA avec un débat et enfin la GPA remise à plus tard.

Les propos de Valls obéissent très certainement à cette logique. Exactement comme Elisabeth Guigou en 1999 qui voulait faire passer le PaCS en le séparant de la filiation. Son discours vibrant sur la différence des sexes était une manipulation, bien assumée depuis. C’est aussi le cas de Najat Vallaud-Belkacem qui se prononce actuellement contre la GPA, alors qu’elle y était favorable il y a un an… Tout est stratégie, il ne faudrait surtout pas que la grenouille prenne conscience trop vite que l’eau est en train de bouillir.

Le discours anesthésiant de Manuel Valls ne doit pas nous faire oublier une chose essentielle : le mariage, dans le droit civil, est intimement lié à la filiation. Ainsi, le projet de mariage pour tous le lie clairement à l’adoption et à la filiation. Si le mariage est ouvert aux homosexuels, il ouvrira les portes à la PMA. Il serait en effet discriminant que les couples mariés hétérosexuels y aient accès et non les couples mariés homosexuels. Si la PMA est ouverte pour les couples mariés lesbiens, pourquoi n’en serait-il pas de même pour les couples d’hommes ? Ainsi, la GPA serait automatiquement justifiée pour les couples d’hommes…et finalement pourquoi pas pour tous afin de ne faire aucune discrimination ?

La logique est imparable et la Valls hésitation de Manuel et des socialistes ne fait que retarder les nouvelles lois qu’ils veulent mettre en place. Nouvelles lois qui sont revendiquées clairement par le lobby LGBT, hormis la GPA qui est moins ouvertement dans les tuyaux. Celle-ci est tout de même demandée, il suffit de se référer au document du Monde de 2011, et aux propos de Pierre Bergé, mais l’inter-LGBT et le gouvernement ne la mettent pas en avant : ce sera une étape suivante.

Ainsi, il est logique que, quand on est contre l’adoption, la PMA et la GPA, nous soyons aussi contre le mariage pour tous… Ce qui ne nous empêche pas de proposer à la place une alliance civile qui ne touche pas le régime de la filiation.

Faut-il un référendum sur le mariage pour tous ?

ReferendumLa question du référendum est arrivée au cœur du débat sur le mariage pour tous. Certains députés de l’opposition ont décidé de déposer une motion référendaire. L’idée fait son chemin : en pleine séance de questions au gouvernement, l’opposition a scandé le slogan « Ré-fé-ren-dum »… ils étaient nombreux à le clamer, la formule a du succès.

Le gouvernement tient tête, sa réponse est non, non et non… ce qui s’explique : si le référendum a lieu, les Français sanctionneront le gouvernement au lieu de répondre à la question posée… du moins pour une bonne partie des électeurs. Au vu de la popularité du gouvernement, Hollande-Ayrault préfèrent éviter cette option, en mettant en avant l’impossibilité constitutionnelle d’une telle consultation et non le risque politique.

Nous n’aborderons pas la question de la constitutionnalité du référendum. Le juriste Nicolas Mathey a abordé cette question avec justesse, et la réponse est loin d’être évidente… disons simplement que le référendum n’est « pas impossible ». C’est plutôt la question de l’opportunité que nous allons voir. Lire la suite

Mariage pour tous : pour des états-généraux de l’enfant

Le gouvernement semble déterminé à faire voter le projet de loi sur le mariage pour tous et l’homoparentalité sans organiser de débat national. Malgré un ajournement du projet à janvier 2013, nous ne voyons pas venir de grand débat, d’états-généraux de la famille traitant de la question essentielle de l’enfant adopté, ou procréé avec assistance médicale, au sein d’un couple homosexuel marié.

Il s’agit d’un fâcheux oubli, parce qu’une telle démarche ne peut pas faire l’impasse d’un débat national à cause de la loi de 2011 sur la bioéthique, mais aussi en raison des promesses du candidat Hollande de respecter les corps intermédiaires. Lire la suite

Le mariage civil est-il d’inspiration catholique ?

Le projet de loi sur le mariage pour tous, révélé en avant-première par La Vie, mentionne quelque chose de surprenant dans son « exposé des motifs ».

Il dit : « Ce mariage laïc, (…) pour l’essentiel transpose les règles du droit canon ». Cette affirmation est fausse : non, la première loi instituant un mariage civil en France n’est pas une transposition du droit canon. Pourquoi ? Rappelons d’abord quelques faits. Le mariage civil a été mis en place par deux lois votées le même jour, le 20 septembre 1792 : la loi organisant l’Etat civil et la loi sur le divorce. Ces deux lois sont les derniers textes votés par l’Assemblée législative. Depuis le 10 août 1792 le Roi est déposé. La monarchie constitutionnelle est mourante et le lendemain, 21 septembre, la première République de l’Histoire de France a été proclamée. Ces lois sont donc votées dans un contexte révolutionnaire très hostile à l’Eglise : dix jours plus tôt eut lieu le massacre de septembre où de nombreux prêtres réfractaires ont été exécutés. La constitution civile du clergé a été rejetée par Rome et la République qui suivi préféra un très déiste culte de l’Etre suprême à la religion catholique. De plus, la monarchie constitutionnelle en place avait une inspiration très libertaire, loin de la doctrine catholique.

Dans un tel climat anti-catholique, peut-on imaginer que le premier mariage civil soit d’inspiration chrétienne ? C’est difficilement concevable. Mais surtout, c’est le contenu de ces lois et la philosophie qui en constitue les soubassements qui démontrent cette non-transposition.

Les lois du 20 septembre obéissent aux dispositions de la Constitution de 1791, Titre II, article 7, qui définit le mariage comme un contrat : « La loi ne considère le mariage que comme contrat civil. » Le mariage n’est plus une institution mais un contrat organisant la vie commune, contrat passé devant l’autorité civile. Comme tout contrat, il peut être défait selon la volonté des parties à la différence du mariage religieux qui est indissoluble. Ce caractère révocable est dans l’esprit de cette constitution très libérale qui considère des engagements définitifs comme contraire aux droits naturels. En préambule ce texte dispose clairement : « La loi ne reconnaît plus ni voeux religieux, ni aucun autre engagement qui serait contraire aux droits naturels ou à la Constitution. » Outre la suppression définitive de tous les vœux monastiques et sacerdotaux, l’engagement indissoluble du mariage est lui aussi banni et considéré comme contraire aux droits naturels.

La particularité du mariage civil est donc sa révocabilité et la loi de 1792 allait beaucoup plus loin que le mariage civil actuel. Le divorce était possible pour faute de l’un des conjoints, par consentement mutuel, et par répudiation due à une incompatibilité d’humeur. La procédure était simple, il suffisait de se « démarier » en retournant devant le maire ! Le divorce n’est pas la seule caractéristique de cette loi de 1792. Le premier mariage civil autorisait la consanguinité. Ainsi, un oncle pouvait épouser sa nièce ! Alors que le droit canon interdisait ce type d’union ainsi que pour les cousins jusqu’au quatrième degré.

Ces dispositions révolutionnaires furent en partie supprimées en 1804 avec le Code civil de Napoléon Bonaparte. Celui-ci adopta une formule plus stable bien qu’ayant une inspiration étrangère au droit canon : le droit de la famille, tel que mis en place par le code Napoléon, est pour l’essentiel tiré du droit Romain. Le mariage civil de 1804 sera la base du mariage civil actuel, même si celui-ci a connu moultes modifications depuis : notion d’autorité parentale à la place de la puissance paternelle (loi du 4 juin 1970), divorce par consentement mutuel (loi du 11 juin 1975) etc. Et je ne mentionne pas les tentatives de supprimer le divorce et son rétablissement au gré des changements de régimes au XIXème siècle (il sera définitivement installé en 1884).

Le divorce, qui plus est très libéralisé comme en 1792, est la marque d’un mariage d’inspiration libérale et laïque. Le mariage religieux est tout autre. L’indissolubilité est la caractéristique du mariage chrétien : « on ne sépare pas ce que Dieu a uni (Mt 19-6)» selon les propos du Christ qui définissait l’interdiction de la répudiation. Il s’agit d’un des rares cas où Jésus parle du mariage et il parle justement de son refus du divorce, discours plus ferme que la loi juive qui autorisait la répudiation. Pour l’Eglise, le mariage est une institution naturelle voulue par Dieu. Bien qu’il repose sur le consentement des époux, il ne peut être défait par les Hommes car ce consentement est validé, béni, par Dieu lui-même.

Il est très surprenant que le gouvernement considère le mariage civil comme étant une transposition du droit canon. Une telle affirmation est non-seulement fausse mais absolument contradictoire avec le caractère libéral-libertaire du mariage pour tous. En effet, le mariage pour tous a la même inspiration libérale que la loi de 1792. Bien sûr, l’homosexualité n’était pas encore reconnue au XVIIIeme siècle. Elle était encore taboue et perçue comme anormale. Néanmoins, le soubassement idéologique est rigoureusement le même… Or, au lieu d’inscrire cette réforme dans une suite du mariage révolutionnaire, le gouvernement veut rompre avec l’héritage de 1792 en le percevant comme un mariage crypto-chrétien !

En nous faisant croire que le mariage civil est un résidu du droit canon, le gouvernement élimine toute possibilité de débat. Ainsi, les défenseurs du mariage hétérosexuel seraient de sinistres théocrates, nostalgiques d’une chrétienté où le code de droit canonique faisait office de code civil. Mais voilà, le mariage civil n’est pas catholique, et les opposants au mariage pour tous ne sont pas de sombres inquisiteurs. Le mariage est l’affaire de tous, ses défenseurs se rencontrent partout : nombreux psychiatres, philosophes, juristes, qu’ils soient croyants ou non, défendent la famille hétérosexuelle et monogame.

Un grand débat national doit donc avoir lieu.