Nouvelles de la Rue de Vaugirard

logoComme vous l’avez remarqué il n’y a pas beaucoup d’activité dans la rue de Vaugirard. Depuis septembre dernier, je n’ai pas posté d’articles ici.

Les choses ont pas mal changé dans ma vie de blogueur… et aussi dans ma vie personnelle.

Je suis toujours présent sur Internet, mais dorénavant j’écris principalement sur les Cahiers Libres, des pages catholiques écrites à plusieurs plumes. La fondation de ce site fait suite au constat d’un manque de blogs collectifs catholiques suivant une ligne éditoriale fervente mais avec un  ton mesuré, modéré et respectueux. Trop de sites collectifs, souvent très lus, ont un marquage idéologique très fort dans lequel beaucoup de catholiques ne se retrouvent pas. Il y a de nombreuses demeures dans la cathosphère, mais certaines sont grandes et visibles, alors que d’autres sont petites, trop discrètes bien que très nombreuses. Les plus “modérés” font partie de cette deuxième catégorie : éparpillés, fonctionnant seuls. Le but des Cahiers Libres est donc d’être un blog collectif de cette sensibilité.

Modéré ne signifie pas mou ou pusillanime, bien au contraire : la modération est la vertu de tempérance qui est maîtrise de soi… et il faut beaucoup de force pour être modéré. La modération est dans le ton, afin de toujours rester dans la charité. Frédéric Ozanam le disait bien dans “Les devoirs littéraires du chrétien” : “Sans la charité, les piliers de la controverse s’effondrent” et “il ne faudrait pas compromettre la sainteté de la cause par la violence des moyens”. Les Cahiers Libres tentent de suivre l’exemple du fondateur de l’Ere nouvelle : un style modéré avec des convictions ferventes. Et des convictions passionnément catholiques et fidèles au Pape. Nous avons lancé Cahiers Libres le soir de la veille de la Saint François d’Assise, comme pour la vigile d’une solennité, afin de marquer notre communion avec le Pape François. Le site indique par là son postulat, son principe : catholique romain, fidèle au Saint Père et à l’enseignement de l’Eglise. Partant de ce point de départ, de cette base éditoriale, les auteurs s’en donnent à coeur joie pour commenter l’actualité, disserter sur des sujets de réflexions et apporter au site leurs inspirations personnelles.

A la base, nous nous sommes réunis à six, avec Joseph Gynt, Benoît, Amblonyx, Fol Bavard et Ayssalène, et nous constituons le comité de rédaction. Nous nous sommes répartis différents thèmes (les “chapitres”) que nous gérons pour veiller au respect de la ligne éditoriale. Tout le monde peut proposer sa contribution à ce blog collectif s’il se reconnaît dans notre démarche.

Mais l’aventure des Cahiers Libres ne veut pas dire que la Rue de Vaugirard soit fermée. J’ai bien l’intention de continuer à écrire des articles ici.

L’autre grand changement qui s’est produit fin 2013 touche à ma vie personnelle : je me suis marié cet automne. Un déménagement, un nouveau poste. Beaucoup de changements en peu de temps, en plus du lancement des Cahiers, ce qui explique mon absence sur ce blog ces derniers mois.

Je vous dis à bientôt sur les Cahiers Libres, mais aussi sur Rue de Vaugirard, ou même IRL pour ceux qui seront à Paris le samedi 1er mars. Nous organisons une petite soirée pour boire et discuter avec les auteurs et les lecteurs des Cahiers. Plus d’informations ici !

Conférences sur Frédéric Ozanam

Frédéric OzanamDans le cadre du bicentenaire de la naissance de Frédéric Ozanam, la Société de Saint Vincent de Paul m’a invité à donner des conférences sur la pensée politique de Frédéric Ozanam. C’est depuis les JMJ de 1997, où il a été béatifié, que je me suis pris d’affection pour lui. Certains ont leur saint préféré : beaucoup sont fans de Ste Thérèse, d’autres sont des inconditionnels de Pier-Giorgio Frassatti et je ne parle pas des groupies de Jean-Paul II… Pour moi, mon préféré c’est Frédéric Ozanam, un laïc qui a osé dire que la devise de la République était “l’avènement temporel de l’Evangile”.

Ozanam est l’un des fondateurs de la Société de Saint Vincent de Paul, l’un des précurseurs de la doctrine sociale de l’Eglise (dixit Jean-Paul II) et l’un des créateurs de la Démocratie chrétienne.

C’est sur ce dernier point que j’interviens dans deux conférences :

– ”La pensée politique de Frédéric Ozanam” à l’Académie de Macon, 41 rue Sigorgne 71000 Macon,  le 26 septembre à 19h.

– ”Frédéric Ozanam, inventeur de la Démocratie chrétienne ?” à la Maison de la Région, 61 La Canebière, 13001 Marseille, le 25 octobre à 10h. Cette conférence sera dans le cadre d’un colloque de deux journées où participeront aussi Charles Mercier, historien et maître de conférence à Bordeaux IV, et le Cardinal Peter Turckson, Président du Conseil Pontifical Justice et Paix.

Frédéric Ozanam mérite vraiment à être connu car il est proche de nous, tout comme son époque qui a des similitudes avec la nôtre. Ses écrits sont d’une grande richesse, que ce soient ses articles de journaux, ses cours à la Sorbonne ou ses lettres à sa fiancée. C’est un saint actuel, présent pour tous ceux qui veulent faire rimer citoyen et chrétien.

Frédéric Ozanam et la Révolution de 1848

Lamartine25fevrier1848Frédéric Ozanam a été un acteur de la révolution de 1848. Certes, il n’a pas joué un rôle politique de premier plan. Mais son influence sur les catholiques de son temps n’a pas été négligeable. L’Eglise a donc béatifié un « révolutionnaire » ! Ce qui tord le cou au cliché d’une Eglise conservatrice qui craint les changements et les révolutions… Regardons de plus près ce qui c’est passé. Lire la suite

Frédéric Ozanam et la politique

La liberté guidant le peupleLa question des idées politiques de Frédéric Ozanam est sans doute celle qui m’a le plus passionné. Certainement parce que ce sont par elles que j’ai découvert Ozanam aux JMJ de 1997 : un Pape, présenté comme dénonçant le capitalisme sauvage et ayant vaincu le communisme béatifiait un homme qui avait approuvé la révolution de 1848. L’Eglise élevait sur les autels un révolutionnaire ! Un bienheureux républicain ! Voilà qui est surprenant alors que les catholiques français du XIXème siècle étaient majoritairement royalistes et, qu’encore de nos jours, les cathos sont représentés comme de pieux conservateurs se méfiant du peuple… Image fausse, du moins en partie, complètement démolie par cette béatification de 1997. Voilà qui parlait au grand adolescent attiré par la gauche[1] que j’étais !

 Mais il est important de connaître son histoire. On ne s’improvise pas révolutionnaire et Ozanam a mis du temps avant de poser des choix essentiels. Nous l’avons vu précédemment, Ozanam a eu très vite des convictions et des engagements sociaux et caritatifs. En 1833 avec la Société de Saint Vincent de Paul, en 1839 avec son cour de Droit commercial où il annonce, avec un siècle d’avance, le contenu du code du travail. Dès 1831 il a eu un engagement intellectuel en dénonçant une des premières idéologies socialistes : le Saint-simonisme. Il avait seulement dix-huit ans.

 Mais concernant la politique, il n’a pas envisagé d’engagement avant 1848. Son cheminement s’est fait par étape. Lire la suite

Frédéric Ozanam, Histoire d’une vocation par Philippe Charpentier de Beauvillé

CouvertureCette année du bicentenaire de la naissance de Frédéric Ozanam (1813-1853) et du 180eme anniversaire de la fondation de la Société de Saint Vincent de Paul (1833), est l’occasion de lire les biographies de Frédéric Ozanam. Les éditions Salvator l’ont bien compris et ont publié un intéressant ouvrage : Frédéric Ozanam, Histoire d’une vocation par l’historien Philippe Charpentier de Beauvillé. Lire la suite

Frédéric Ozanam : la charité, la justice et la lutte des classes

Révolte des CanutsFrédéric Ozanam a connu une France en pleine mutation. Né en 1813 et mort en 1853, il a vécu à une période où la société française s’est radicalement transformée tant d’un point de vue politique que social. Politique car il a connu cinq régimes. Social parce que cette période est celle de la Révolution industrielle qui a complètement modifié les classes sociales et les rapports économiques et sociaux dans le pays. Rapidement, une nouvelle société s’est construite avec d’un côté une bourgeoisie industrielle riche et puissante, de l’autre une classe ouvrière pauvre et nombreuse. Les changements politiques de la France ont accentué cette mutation. Ozanam a connu cinq régimes politiques : l’Empire de Napoléon 1er, la Restauration à partir de 1815, la Monarchie de Juillet en 1830 avec le Roi des Français Louis-Philippe 1er (curieux monarque qui n’avait pas de légitimité et qui s’inspirait des principes de 1789), la IIème République en 1848 et enfin le second Empire en 1852. La France changeait et certains régimes, comme la Monarchie de Juillet, ne refusaient rien à la nouvelle classe qui dirigeait l’économie du pays…

La Révolution industrielle a entraîné un exode rural qui a rempli les villes de populations ouvrières misérables. Ozanam a connu le Paris de 1831 qui est celui que décrit Victor Hugo dans les Misérables. Les ouvriers travaillaient durement, tous les jours, toute la journée, dans des conditions catastrophiques. Ils recevaient un salaire de misère et vivaient dans des taudis. Aucunes vacances, aucun repos, aucune protection en cas de maladie, pas de retraite : il était difficile pour eux d’élever leur famille et de vivre décemment. Lire la suite

Frédéric Ozanam, historien

Ozanam« Pendant que les catholiques s’arrêtaient à la défense de la doctrine, les incroyants s’emparaient de l’histoire. (…) Il nous faut reconquérir ce domaine qui est à nous, puisque nous le trouvons défriché de la main de nos moines, de nos bénédictins, de nos bollandistes[1]. Ces hommes pieux n’avaient pas cru leur vie mal employée à pâlir sur les chartes et les légendes. (…) je veux montrer le bienfait du christianisme dans ces siècles mêmes dont on lui impute les malheurs.[2] » 

Ainsi parlait Frédéric Ozanam en ce vendredi saint de l’année 1851, dans l’avant propos de son cour sur la civilisation au Vème siècle. Dans ce long texte introduisant son enseignement à la Sorbonne, Frédéric Ozanam nous délivre un émouvant testament spirituel et intellectuel. Spirituel, car il y relate son adolescence difficile, où il avait perdu la foi, et sa conversion grâce à l’abbé Noirot. Intellectuel, car il nous livre les raisons profondes de son travail universitaire, de sa double vocation de chercheur et d’enseignant.  Lire la suite

Et si on (re)découvrait Frédéric Ozanam ?

Frédéric OzanamLa société de Saint Vincent de Paul fête cette année le bicentenaire de la naissance de son principal co-fondateur : Frédéric Ozanam. Né en 1813, il a fondé, avec quelques amis, la première « conférence de charité » en 1833, et il est mort en 1853. 2013 est donc un triple jubilé : bicentenaire de sa naissance, 180 ans de la société de saint Vincent de Paul, 160 ans de l’entrée au ciel de Frédéric. 

Ozanam n’est pas encore très connu et c’est bien dommage car il a une personnalité passionnante. 

Je l’ai personnellement découvert en 1997, lors des Journées mondiales de la jeunesse de Paris. Frédéric Ozanam a été béatifié à cette occasion par Jean-Paul II, à Notre-Dame. Cette rencontre a été pour moi décisive. J’avais 18 ans. J’étais un grand adolescent en quête de vérité et de justice sociale. L’heure était à la contestation et plusieurs fois il m’arrivait de remettre sérieusement en question l’éducation catholique que j’avais reçue. La foi en Dieu restait intacte, mais c’était avec l’Eglise que j’étais en froid… c’est ainsi que je suis allé aux JMJ avec des pieds de plomb. 

L’évènement des JMJ, les enseignements reçus, l’image de ce pape au corps épuisé mais à l’esprit jeune et flamboyant qui appelle à « construire la civilisation de l’amour », tout cela m’a bouleversé. Je m’étais réconcilié avec l’Eglise. J’avais découvert sa dimension prophétique, la puissance de son message dans un monde en pleine mutation. 

L’appel de Jean-Paul II à construire la civilisation de l’amour était accompagné d’un exemple concret : la vie et la personne de Frédéric Ozanam. Le bienheureux Ozanam est bien différent des autres saints de l’Eglise. Laïc, marié, père de famille, tour à tour avocat, professeur de droit puis professeur de lettres à la Sorbonne, il était engagé dans la société française du début du XIXème siècle. Il avait un engagement social avec la fondation des conférences de Saint Vincent de Paul, un engagement politique avec sa participation active à la révolution de 1848, un engagement intellectuel avec son travail de recherche en histoire des religions. Tous ses engagements étaient habités, motivés, par une foi ardente et un immense amour du Christ et de son Eglise. 

Ozanam était un citoyen, témoin des changements de son temps qui ont engendré le monde moderne que nous connaissons. Cet exemple est peut-être un des plus parlant pour quiconque souhaite s’engager dans la Cité aujourd’hui. C’est sans doute cet aspect qui m’a le plus marqué chez lui : le citoyen et, soyons clair, le révolutionnaire républicain de 1848. Ozanam n’a pas eu peur de dire que la devise « Liberté, égalité, fraternité » est « l’avènement temporel de l’Evangile » alors que bon nombres de catholiques étaient monarchistes. Ozanam a pris position en faveur de la démocratie alors que ce régime était mal perçu par l’Eglise. Ses choix audacieux ont fait de lui un visionnaire : il a anticipé, et inspiré, la doctrine sociale de l’Eglise, il a contribué à la fondation de la démocratie chrétienne

Ozanam était aussi un ardent défenseur de l’Eglise, même s’il se permettait quelques critiques… il était un évangélisateur et non un propagandiste, un prophète et non un petit soldat. Intellectuel engagé, il a été un historien pionnier dans la réhabilitation d’un Moyen-âge trop souvent caricaturé.

Cette grande figure mérite d’être redécouverte tant elle peut être une source d’inspiration pour aujourd’hui. Sa manière d’être, à la fois audacieuse et loin des extrémismes, ferme et non-violente, à l’écoute de ses adversaires mais toujours dans le respect, fidèle à l’Eglise mais avec un esprit critique constructif, tout cela fait d’Ozanam un personnage exemplaire pour notre époque riche de débats passionnés et d’enjeux cruciaux. 

Pour mieux le connaître, je diffuserai dans les semaines à venir, quelques articles sur différents aspects de la vie et de la personnalité de Frédéric Ozanam. Il s’agira de quelques réflexions sur certains épisodes de sa vie, certains de ses ouvrages ou encore sur certaines facettes de ce personnage très riche. 

A suivre !

1848 : L’Ere nouvelle et la « première » Démocratie chrétienne

Il est une date fondamentale, voire fondatrice de la Démocratie chrétienne : 1848. La Révolution de 1848 est une des grandes pages de l’Histoire de France. Mal connue, surement mal-aimée, c’est sans doute la seule révolution où l’Eglise n’a pas été vilipendée. Les prêtres bénissaient les arbres de la liberté, des hommes proches de la foi chrétienne ou se disant ouvertement catholiques comptaient parmi les révolutionnaires.  Lire la suite