Quelle stratégie pour un engagement politique après les Manifs pour tous ?

Mariannes pour tousLa loi instituant le mariage pour tous a été votée, promulguée, le premier mariage unissant deux hommes a été célébré… Alors c’est fini ? Les neuf mois de manifestations, happenings, de pression médiatique, politique, ces longs mois de luttes où des centaines de milliers de personnes ont été mobilisées, où ces personnes ont été ignorées et même pour certaines réprimées par le gouvernement, ce long combat a-t-il été mené pour rien ?

Non, je ne le crois pas. Certes, le temps du slogan « Taubira ta loi on en veut pas » est dépassé. Le temps du combat contre le projet de loi Taubira est terminé, mais nous entrons dans une nouvelle étape politique. Cette fois-ci, le théâtre des opérations ne sera plus dans la rue, mais dans les urnes… à condition que nous nous organisions avant. Lire la suite

Faut-il un référendum sur le mariage pour tous ?

ReferendumLa question du référendum est arrivée au cœur du débat sur le mariage pour tous. Certains députés de l’opposition ont décidé de déposer une motion référendaire. L’idée fait son chemin : en pleine séance de questions au gouvernement, l’opposition a scandé le slogan « Ré-fé-ren-dum »… ils étaient nombreux à le clamer, la formule a du succès.

Le gouvernement tient tête, sa réponse est non, non et non… ce qui s’explique : si le référendum a lieu, les Français sanctionneront le gouvernement au lieu de répondre à la question posée… du moins pour une bonne partie des électeurs. Au vu de la popularité du gouvernement, Hollande-Ayrault préfèrent éviter cette option, en mettant en avant l’impossibilité constitutionnelle d’une telle consultation et non le risque politique.

Nous n’aborderons pas la question de la constitutionnalité du référendum. Le juriste Nicolas Mathey a abordé cette question avec justesse, et la réponse est loin d’être évidente… disons simplement que le référendum n’est « pas impossible ». C’est plutôt la question de l’opportunité que nous allons voir. Lire la suite

Sénat rose

Il a basculé ! Enfin, le Sénat a connu l’alternance politique ! 

Joie à gauche, panique à droite, la Haute-assemblée comprend désormais une courte (deux voix) majorité socialo-communiste (et consorts). 

Vous me connaissez, je ne suis pas un inconditionnel dela gauche. Maisce n’est pas ça qui me fera pousser des cris d’orfraies ! Bien au contraire ! Le Sénat vient de prouver qu’il était une institution démocratique ! 

C’est déjà un début car la chambre haute est sans doute l’institution la plus mal comprise de la République ? Pourquoi ? Mais parce que tout le monde lui donne une définition qui ne lui correspond pas, ou que l’on cherche à tout prix à le réformer pour tenter de l’avoir à sa botte ! 

Regardons de plus près la Haute-assemblée : Au soir de la victoire, François Hollande disait que c’était une défaite pour la droite et la première étape de la victoire de la gauche… 

Beaux propos démagogiques, si le Sénat à basculé ce n’est pas à cause de l’humeur des grands électeurs…Mais parce que les collectivités sont, petit à petit, devenus majoritairement socialistes. Les dernières régionales ont été un tsunami rose, les cantonales ont donnés au PS de nouveaux départements, et les municipales avaient vu de nombreuses communes devenir socialistes. C’est un glissement en plusieurs étapes, le Sénat étant la dernière. 

Mais le Sénat reflète des victoires électorales précédentes et liées au travail des candidats locaux…Son basculement n’a donc absolument rien à voir avec la politique nationale actuelle ! Les grands électeurs n’ont pas voté en fonction de Nicolas Sarkozy mais en fonction d’élus de terrain choisis sur des problématiques locales… 

Car c’est là le cœur du sujet : le Sénat représente les collectivités territoriales (et l’Assemblée des français établis hors de France). Mais beaucoup d’hommes politiques ne semblent pas le comprendre… 

Je me rappelle d’un débat politique, il y a de nombreuses années, où la question de la réforme du Sénat avait été avancée. Nous étions pendant les années Jospin, ce dernier souhaitait une chambre haute plus « représentative ». La gauche se plaignait d’une assemblée éternellement à droite, ne pouvant connaître l’alternance politique. C’était sans doute révélateur d’un défaitisme des socialistes devant leurs difficultés à s’implanter dans le monde rural…Et donc, dans ce débat le Sénat était présenté par la gauche comme une chambre de notables. 

Mais le plus pathétique venait d’Alain Madelin : avec moult effets de manche il avait dit « le Sénat est une chambre de sagesse ! », ce à quoi Jean-Noël Jeanneney (PRG) a répondu : « Monsieur Madelin, la sagesse est-elle de droite ». Un point pour Jeanneney ! Quelle idée de dire une telle absurdité, le Sénat serait donc une chambre de sagesse et l’Assemblée nationale une chambre de folie ? 

Evidemment, le Sénat n’est pas un « Conseil des sages » comme on pourrait le voir dans certains récits mythologiques. La Rome antique est loin de tout cela et d’ailleurs le Sénat Romain n’était guère enclin à la vertu et à la tempérance…C’était davantage une assemblée d’aristocrates dans le style de la Chambre des Lords (l’hérédité en moins). 

Et d’ailleurs qu’est ce que la  sagesse ? Est-ce une élection qui va décider si on est sage où si on l’est pas ? 

Le Sénat n’est pas un conseil de vieux notables de droite, ce n’est pas ce que dit la constitution. Carc’est là le plus important : si vous voulez connaître cette institution n’écoutez pas les hommes politiques, regardez le texte constitutionnel : « Il assure la représentation des collectivités territoriales de la République.» C’est tout ! Qu’il soit de droite ou de gauche c’est l’affaire des collectivités locales ! Aux partis de travailler le terrain !

Bien sur on peut discuter de son mode de fonctionnement. Il a ses vertus : une certaine distance des tumultes de la vie politique et médiatique. Ses faiblesses : représente-t-il efficacement les collectivités ? Pas si sur… 

Je ne suis pas contre une réforme du Sénat. Pourquoi ne pas s’inspirer d’un modèle très efficace : le Bundesrat Allemand. La chambre haute d’outre Rhin, Conseil fédéral en français, représente les Länder. La représentation est parfaite parce que les conseillers fédéraux sont des membres des exécutifs des états fédérés mandatés par les gouvernements locaux. Ils ont donc un mandat impératif et sont la voix de leur Land. 

Un tel modèle ne peut-être transposable parfaitement chez nous car l’Allemagne est un Etat fédéral. Néanmoins il serait de bon ton de s’en inspirer. Pourquoi ne pas faire du Sénat un « Conseil des Territoires » ? Il comprendrait tous les Présidents de régions, les maires des cents plus grandes villes et des conseillers élus par les communes, ou intercommunalités, rurales. Chaque représentant aurait un nombre de voix plus ou moins important selonla collectivité. Ainsiles régions et les villes seraient directement consultées pour le vote dela loi. Lesélus ruraux auraient un contact direct avec leur conseillers et peut-être même le pouvoir de le révoquer si son travail parlementaire ne satisfait pas ces messieurs (et dames)…Mais là, ça impliquerait de revenir sur l’interdiction du mandat impératif qui figure dans la constitution… C’est un autre débat !